Responsabilité du chef de l’Etat

Editorial du 28/2/2022

Le président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine, a déclaré la guerre à son voisin, l’Ukraine. Nous pouvons le déplorer car les conséquences directes et indirectes de ce conflit vont peser sur l’ensemble des pays européens dont l’Ukraine et la Russie. Le risque d’une extension de ce conflit est majeur.

Mais, il faut se dégager d’une lecture trop rapide des événements pour prendre de la hauteur et analyser les raisons de ce conflit.

Responsabilité du chef de l’Etat

Tout chef d’Etat à la responsabilité d’engager son armée pour défendre ses frontières quand cela devient nécessaire.

C’est le cas de la France qui a envoyé des troupes au Mali pour engager une guerre contre des terroristes islamistes qui ne menacent pourtant pas nos frontières, mais mettent en danger la sécurité intérieure de la France. Nos troupes sont donc présentes sur le continent africain avec de l’infanterie, des armes légères et lourdes ainsi que de l’aviation. Nos troupes font la guerre, ceci est une évidence même si la situation géopolitique n’est pas celle de l’Ukraine et de la Russie. Doit-on rappeler également que le chef de l’Etat français a envoyé nos hommes en Afghanistan, pays qui ne menaçait pas non plus nos frontières. Certes l’islamisme pouvait s’étendre et susciter des troubles chez nous, mais nous n’avons pas eu d’états d’âme pour mener une guerre sur ces territoires, guerre qui a fait des victimes civiles et militaires.

Nous pourrions étendre cette réflexion à d’autres conflits armés, dans lesquels nous avons engagé des troupes, alors que notre sécurité n’était pas directement engagée : Yougoslavie, Libye, Syrie. Ces opérations militaires n’ont pas contribué à la stabilité politique des pays concernés.

Conflit russo-ukrainien

Il convient d’analyser les causes politiques et géopolitiques de ce conflit avant de tirer à boulets rouges sur le président de la Fédération de Russie.

Vladimir Poutine, en sa qualité de chef d’Etat, a la possibilité d’engager des troupes pour défendre ses intérêts vitaux. La question est de savoir si tout a été mis en œuvre au regard de la diplomatie pour résoudre pacifiquement le conflit, avant de déclencher un conflit militaire. Il est difficile de répondre parfaitement à cette interrogation.

Mais, les accords de Maïdan qui étaient censés résoudre pacifiquement le conflit n’ont pour l’instant pas été signés par les trois parties au conflit : l’Ukraine, Donetsk et Lougansk. La France et l’Allemagne, en qualité d’observateurs impartiaux, ont-elles fait les efforts qui leur étaient demandés pour pousser les parties à trouver une solution pacifique ? La réponse à cette dernière question à l’évidence est : non. On ne peut reprocher à la Russie son manque de patience dans ce dossier, d’autant que les populations russophones du Donbass étaient sous le feu de l’armée ukrainienne.

Il apparaît de plus en plus clairement que les pays occidentaux ont laissé pourrir la situation et, de ce fait, partagent une lourde responsabilité avec la Russie dans le déclenchement du conflit. Il convient donc de rechercher toutes les racines du mal et de porter un regard froid sur celles-ci pour dégager une leçon pour l’avenir.

La surenchère des médias et des politiques de tous bords, dans ce dossier, est foncièrement dangereuse. Elle ne permet pas de ramener les deux pays à la raison et d’entrevoir une solution diplomatique. Espérons que cette dernière sera la voie privilégiée par nos pays.

Philippe Lassalle