Editorial du 17/4/2023
Les mouvements sociaux qui affectent aujourd’hui la France révèlent plusieurs maux apparemment contradictoires et qui touchent en profondeur notre pays.
- L’impact des idéologies et le poids des communautés s’inspirant de celles-ci forment un pôle hostile aux réformes nécessaires. En effet, le rue est occupée majoritairement par des associations se réclamant de la gauche radicale, voire de l’extrême gauche, ainsi que par des syndicats historiquement révolutionnaires et de moins en moins représentatifs. La violence induite par ces mouvements idéologiques est intelligemment calculée. Elle a pour but de créer un climat de peur, d’insécurité et de préparer à terme une prise de pouvoir dans la plus pure tradition révolutionnaire. Au sein de ces mouvements, s’agrègent cependant des personnes sincèrement mécontentes des mesures prises par un pouvoir de plus en plus éloigné de leurs préoccupations quotidiennes.
- La mainmise des pouvoirs publics sur l’ensemble des décisions qui affectent notre quotidien. Inconsciemment, les Français souffrent de cette omniprésence de l’Etat. Ceci est particulièrement criant sur le plan des retraites. En effet, les carrières professionnelles varient au gré des secteurs d’activité et selon les profils individuels. Il est donc illusoire de légiférer uniformément pour un ensemble de salariés sans susciter des rancœurs et des oppositions. Redonner la possibilité aux corps professionnels et aux secteurs d’activité, c’est-à-dire aux intéressés, de prendre en charge partiellement la gestion des retraites du personnel les concernant en fonction des contraintes propres à certains métiers, permettrait d’avoir une approche plus fine et plus juste des événements affectant une carrière professionnelle (retraite, maternité, accidents du travail, etc).
- Un pouvoir politique devenu de plus en plus oligarchique, donnant le sentiment à la majorité de nos concitoyens qu’ils ne sont plus représentés et que les jeux sont faits. Le pouvoir utilise la complexité juridique de nos institutions, de nos lois et règlements pour imposer son calendrier de réformes. Calendrier de réformes de plus en plus illisible donnant l’illusion d’un gouvernement en action, alors qu’il détruit fondamentalement l’âme de notre pays. Les libertés sont de plus en plus bafouées. La récente décision par le Conseil constitutionnel de valider la réforme des retraites, réforme illisible ne s’attaquant pas aux causes réelles du déficit public, contribue à mettre de l’huile sur le feu. Des minorités politiques profitent de l’aubaine pour s’attaquer à nos institutions alors que bon nombre de nos contemporains souhaiteraient que soient pris en compte leurs attentes en matière de retraite.
- Le recours aux forces de police et de gendarmerie pour rétablir la paix dans nos cités est de plus en plus mal vécue par une majorité de nos concitoyens, partagés entre la soif de vivre en paix chez soi et le rejet de cette réforme dont on ne perçoit pas l’urgence et le bien fondé. Progressivement, la violence devient un moyen politique de régler les différends dans la rue. De ce fait, la police use de moyens parfois excessifs face à des groupes d’individus par ailleurs extrêmement violents. Cette violence devient un exutoire du malaise général. Il devient difficile de distinguer le bon grain de l’ivraie. Mais cette violence ne résout pas les problèmes de fond qui demeurent.
Cette crise met en valeur la cruelle absence d’un arbitre au sommet de l’Etat, capable de prendre du recul par rapport aux forces politiques en présence qui veulent imposer leur volonté au détriment des Français eux-mêmes. Cette crise souligne également le profond mépris de la classe politique pour ceux dont ils sont censés défendre les intérêts. Ce mépris est alimenté par l’entre soi qui est devenu la règle et par un certain nombre d’associations plus ou moins occultes qui ont accaparé le pouvoir réel. Cependant, prenons garde aux faux prophètes, aux promesses d’un soir sans lendemain, aux vraies fausses solutions. Nous avons besoin d’être gouvernés. C’est le rôle des hommes de gouvernement et du chef de l’Etat. Cela ne changera pas. Mais nos institutions sont malades et dépérissent faute d’une soif de défendre la France et ses intérêts.
Philippe Lassalle