« Il n’est de richesse que d’hommes » (Jean Bodin)

François Bayrou

François BayrouDans le brouhaha de cette campagne présidentielle, on peut retenir un discours discret, qui a le grand mérite d’aborder, enfin, une question de fond, et pas des recettes de cuisine.

Il s’agit des propositions de M. Bayrou sur l’école, avancées lors d’une journée thématique, le samedi 4 février, à la Maison de la chimie, à Paris.
Si le président du Modem a souvent brillé par son ambiguïté, louvoyant à gauche et à droite et illustrant l’inconsistance de sa position « extrême centriste », il faut bien souligner, ici, un propos de valeur, tourné vers l’avenir.

Nous autres royalistes ne pouvons que nous retrouver dans plusieurs points.

M. Bayrou rappelle, dans ce discours, des fondamentaux souvent oubliés : « le premier lieu de l’éducation, c’est la famille ». On ne peut que s’en féliciter dans la bouche d’un candidat républicain, alors que ce régime s’est illustré par la confiscation de l’éducation depuis les lois scolaires de la IIIe République. « D’abord les bases, et les bases d’abord », martelle-t-il, en appelant au retour de la méthode syllabique, à la bonne maîtrise de la langue française dès les petites classes, au bon apprentissage de l’histoire et des matières scientifiques. Voilà un discours d’autant plus rafraichissant pour tout parent d’élève et tout Français de bonne volonté, que M. Bayrou l’inscrit dans le désir d’une politique de continuité, en appelant à la fin de la « réformite » dans l’éducation nationale, qui n’a d’autre effet que de déstabiliser et démoraliser les professeurs.
Par ailleurs, le candidat centriste inscrit ses propositions dans une perspective plus large qui est de redonner à l’école française un des premiers rangs mondiaux, mais en se fondant sur l’acquisition des savoirs fondamentaux. Sans le dire, il se prononce également pour le rétablissement des classes de niveau, pour permettre au professeur de mieux adapter son enseignement, des heures d’études pour permettre aux élèves de réaliser leurs devoirs à l’école et non à la maison, sous la conduite d’un maître ou d’un surveillant. Il tord le cou également à l’excès de la « paperasserie » et des réunions idéologiques qui agacent la vie de l’enseignant. Enfin, proposition d’intérêt, M. Bayrou souhaite développer l’enseignement professionnel par le biais d’une meilleure information sur les métiers dès les débuts du secondaire, et la mise en valeur de l’apprentissage avec l’entreprise.
Pour résumer, il souhaite une école au service des parents et des enfants, en phase avec le monde extérieur, axée sur ses enseignements fondamentaux et redonnant leur liberté d’action aux professeurs.

On ne peut que se féliciter d’un tel programme de fond, qui fait fi des idéologies et de la langue de bois. En ce sens, M. Bayrou se positionne clairement au-dessus du clivage partisan droite-gauche, ne cherchant pas ses solutions dans un camp ou l’autre, mais dans le bon sens. Yves-Marie Adeline avait raison d’écrire, il y a quelques années, que le président du Modem est un royaliste qui s’ignore.

Hélas ! Hélas ! Hélas ! Ses efforts sont voués à l’échec. En effet, la position centriste qui est la sienne est impratiquable dans notre République, où l’échiquier politique est structurellement polarisé entre droite et gauche, entre idéologies contraires qui tendent jusqu’à la rompre la corde de l’équilibre politique. Dans ce contexte, pour gouverner, M. Bayrou, président élu, aura besoin de soutiens à la chambre et dans les syndicats de l’éducation s’il souhaite mener à bien ses réformes. Confronté alors aux désirs partisans et aux privilèges des uns et des autres, il devra composer sans cesse jusqu’à dénaturer son projet initial, et ne pourra s’en remettre à un arbitre supérieur et permanent tel que le serait le roi, puisqu’il n’y en a plus en France.
M. Bayrou serait de droite ou de gauche, il ne pourrait faire de telles propositions de bon sens sur l’éducation, car son étiquette partisane le contraindrait à se placer en rejet du camp d’en face et à teinter son programme des doctrines, ou proclamés telles, de son groupe. Mais étant centriste, s’il peut faire ces propositions orientées vers le bien commun, il ne peut en revanche espérer les faire appliquer un jour, car pour gouverner, il aura besoin de la droite ou de la gauche. Le centrisme est ainsi une voie sans issue, en République, mais sans doute celle qui présente le mieux, par sa volonté d’échapper à la polarisation partisane, une ouverture royale.

Pour tout dire, M. Bayrou aurait sans doute sa place comme… ministre de l’éducation nationale d’un roi de France.

C’est pourquoi, de nouveau, l’Alliance royale appelle chaque Français à se reposer la question de ses institutions, pour le retour d’un roi en France, arbitre actif au-dessus des partis.

Gabriel Thibout